L’essor du futsal marocain : Les leçons à retenir

Pendant que les exploits des Lions de l’Atlas sur gazon captivent le monde, une autre révolution, plus discrète mais tout aussi impressionnante, se déroule sur les parquets.
L’équipe nationale marocaine de futsal s’est imposée en quelques années comme une superpuissance mondiale, passant du statut d’outsider à celui de favori dans les plus grandes compétitions.
Triple championne d’Afrique en titre, triple championne arabe, et quart de finaliste de la dernière Coupe du Monde, l’ascension de cette équipe n’a rien d’un hasard.
Elle est le fruit d’une stratégie mûrement réfléchie, d’un travail de longue haleine et d’une vision claire. Alors que de nombreuses fédérations cherchent la formule magique du succès, le modèle marocain en futsal offre des leçons précieuses et transposables. Décryptage des piliers qui ont bâti cette machine à gagner.
Hicham Dguig, l’Architecte du Projet
On ne peut évoquer le succès du futsal marocain sans prononcer son nom : Hicham Dguig. À la tête de la sélection depuis 2010, il est bien plus qu’un simple entraîneur ; il est l’architecte, le garant et le symbole de ce projet.
Dans un monde du sport où les entraîneurs sont souvent les premiers fusibles, sa longévité est la première leçon. La Fédération Royale Marocaine de Football (FRMF), sous l’impulsion de son président Fouzi Lekjaa, a fait le pari de la stabilité. Elle a donné à Dguig le temps et les moyens de construire, de se tromper, d’ajuster et enfin de récolter les fruits de son travail.
Ancien joueur international, Dguig a su inculquer à son groupe une culture de la gagne basée sur une discipline de fer, une rigueur tactique et une force mentale exceptionnelles. Il a créé un groupe soudé, où l’amour du maillot et le dépassement de soi sont des valeurs cardinales.
Sa connaissance parfaite des rouages du futsal national et international lui a permis de bâtir une équipe à son image : ambitieuse, travailleuse et redoutablement efficace.
Les Piliers de la Réussite : Les Leçons du Modèle Marocain
Le succès de l’équipe nationale repose sur un écosystème vertueux. Plusieurs décisions stratégiques ont transformé le paysage de la discipline au Maroc.
Leçon n°1 : Un Championnat National Structuré et Compétitif
La force d’une sélection nationale est le reflet de son championnat local. Consciente de cet enjeu, la FRMF a investi massivement dans la structuration d’un championnat de futsal de premier plan. La D1 Futsal est aujourd’hui une ligue professionnelle, attractive et d’un niveau très élevé, considérée comme l’une des meilleures du monde.
Des clubs comme le Loukkos Ksar El Kébir (CSK), l’Ajax Kénitra ou le Faucon d’Agadir (ASFA) se livrent une bataille acharnée pour le titre.
Cette compétitivité locale offre un vivier de talents inestimable pour Hicham Dguig. Les joueurs évoluent chaque semaine dans des matchs à haute intensité, ce qui les prépare aux joutes internationales.
Et contrairement à d’autres nations, le Maroc n’a pas besoin de chercher ses talents à l’étranger ; ses meilleurs joueurs sont les stars de son propre championnat.
Leçon n°2 : L’Investissement dans des Infrastructures de Classe Mondiale
Le talent a besoin d’un environnement propice pour éclore. La création du Complexe Mohammed VI de Football à Maâmora est une autre clé de voûte de ce succès.
Ce joyau offre des conditions de préparation dignes des plus grandes nations du sport : terrains aux normes internationales, salles de musculation, unités médicales de pointe, espaces de récupération et d’hébergement.
L’équipe de futsal, au même titre que l’équipe de football à onze, bénéficie de ces infrastructures pour ses stages et sa préparation. Cet investissement matériel démontre une ambition et donne aux joueurs et au staff les outils pour viser l’excellence.
Leçon n°3 : Forger une Identité de Jeu Forte
L’équipe du Maroc ne se contente pas de gagner ; elle le fait avec la manière. Hicham Dguig a réussi à créer un alliage parfait entre la rigueur tactique inspirée des grandes écoles européennes et sud-américaines, et la créativité technique individuelle propre aux joueurs marocains.
La sélection est reconnue pour son bloc défensif quasi imprenable, son pressing agressif et sa capacité à se projeter rapidement en attaque grâce à des joueurs de classe mondiale comme Soufiane El Mesrar, Bilal Bakkali ou Anas El Ayyane. Cette identité de jeu claire, maîtrisée par tous, rend l’équipe difficile à manœuvrer et redoutable pour n’importe quel adversaire.
Des Résultats qui Parlent d’Eux-Mêmes
La stratégie mise en place a été validée par une série de succès éclatants :
- Coupe d’Afrique des Nations (CAN) : Trois titres consécutifs en 2016, 2020 et 2024, avec une domination sans partage sur le continent.
- Coupe Arabe des Nations : Trois titres consécutifs en 2021, 2022 et 2023, souvent remportés avec des scores fleuves.
- Coupe du Monde : Une qualification historique en quart de finale en 2021, une première pour le Maroc, qui s’incline avec les honneurs face au Brésil.
Le futsal marocain est certainement un Modèle à Suivre
L’histoire à succès du futsal marocain est bien plus qu’une simple épopée sportive. C’est un cas d’école en matière de développement et de planification stratégique.
Elle prouve que la réussite au plus haut niveau n’est jamais le fruit du hasard, mais la conséquence logique d’une vision claire, d’investissements ciblés, et surtout, de la confiance accordée à un projet et à un homme sur le long terme.
La stabilité, la structuration d’un championnat d’élite, l’investissement dans les infrastructures et la création d’une forte identité de jeu sont les quatre leçons cardinales à retenir.
C’est un modèle dont beaucoup de fédérations, y compris dans d’autres disciplines, pourraient s’inspirer pour transformer le potentiel en excellence durable.